
L’enfant à haut potentiel intellectuel et sa famille
- Publié par Marie Fournier-Bidoz
- Le 10 janvier 2017
(« L’enfant à haut potentiel et sa famille » fait suite à l’article l’enfant précoce, une première rencontre…)
L’enfant précoce est relativement sensible : les cinq sens sont très aiguisés. Petits, certains enfants supportent difficilement certaines odeurs, certaines matières sur leur corps (une étiquette qui frotte, un pull qui gratte…) Parfois même allant jusqu’au point où l’enfant est obnubilé par une gêne et ne peut plus porter son attention sur autre chose.
L’humeur de l’enfant est très variable : une petite frustration peut le décontenancer, sa colère peut parfois être perçue comme exagérée ou comme non sensée… Toutefois, il est capital de souligner qu’il ne s’agit pas de caprices. Ce sont des faits réels pour l’enfant qui viennent le perturber et le bousculer de façon très intense.
Très lucide et très sensible, l’enfant comprend finalement trop tôt les réalités de la vie. Cela peut être une réelle source d’angoisse pour lui. Une réponse apportée à l’enfant appelle alors à une nouvelle question. Les interrogations sont d’ailleurs sans fin…
L’enfant, dès son plus jeune âge, est submergé d’un bon nombre de questions. Sa soif de savoir, de comprendre, le pousse à ne pas prendre en considération certains « codes » : il coupe facilement la parole, ne laisse que peu de place aux autres, etc.
Il est essentiel de rassurer (encore plus) ces enfants. Les questions envahissantes, bien qu’elles soient entendues par les parents, conduisent parfois l’enfant a une certaine anxiété. Répéter les choses, rassurer, être à l’écoute des inquiétudes est primordial. Le cadre permet de contenir au mieux ces enfants qui auront tendance à s’éparpiller de trop.
Bien que les enfants précoces aient un discours relativement mature et sensé, ils ont besoin d’avoir des réponses claires et adaptées à leur âge. Malgré ses compétences intellectuelles l’enfant « n’a que son âge » ! Le point le plus important est qu’il se sente pris au sérieux. Ignorer les questions ou sous-estimer l’importance de la demande inquiètent grandement l’enfant. Cela renforce ses préoccupations.
- Quelle communication?
- Inciter l’enfant à expliquer ce qui l’inquiète, utiliser des livres, des dessins, rassurer sur la présence parentale
- Instaurer un climat de confiance qui permet à l’enfant de s’exprimer librement (tout en ayant tout de même certaines limites)
- L’enfant qui déborde de trop dans ses propos ou qui n’est satisfait par aucune réponse se doit parfois d’être « stoppé » par son parent. Contenir l’enfant et son discours pourra lui permettre de se canaliser au mieux.
- Un cadre (bienveillant)
- Comprendre ne signifie pas tout accepter
- Mettre des limites (l’enfant aura tendance à toujours vouloir négocier)
- Utiliser l’humour peut être une bonne solution (pour certains enfants) : ils y sont souvent très réceptifs. L’objectif n’étant pas de vexer l’enfant mais de dédramatiser au mieux la situation.
- Gérer la frustration
L’enfant HP a tendance à vouloir tout, tout de suite. Il ne supporte pas attendre. Il veut tout voir, tout comprendre et tout essayer. La frustration est difficilement supportable pour ces enfants : cela leur renvoie leur impuissance (et celle des autres). Quoi qu’il en soit, il va devoir apprendre à écouter les autres et accepter que tout n’est pas possible et réalisable. Il est important d’accompagner l’enfant (contenance) dans l’acceptation de ce ressenti. Progressivement il faut lui apprendre à temporiser et réaliser que le monde n’est pas à l’image de son idéal.
- Encourager l’enfant à persévérer
Très souvent le « petit zèbre » a très peur de l’échec. Il préfère ainsi ne pas faire que de se tromper. L’encourager à persévérer face à la difficulté est très important : réussir quelque chose de difficile pourra lui permettre de gagner confiance en lui. Un enfant qui apprécie un sport, un instrument ou tout autre activité pourra être encouragé à progresser. Ce n’est pas parce qu’un enfant est diagnostiqué HP qu’il doit avoir de la facilité dans tous les domaines ! Aider son enfant à se découvrir une passion peut l’aider à persévérer dans un domaine en particulier et gagner confiance en lui.
Oser demander de l’aide…
Le travail du psychologue avec les enfants à haut potentiel intellectuel :
- Eclairer l’enfant et les parents sur la précocité. Expliquer à l’enfant en quoi il a des façons très différentes de réagir, de faire, de penser… (comparer aux autres enfants de son âge)
- Travailler sur les émotions – comprendre ses réactions – mettre des mots sur ses peurs et ses angoisses
- Un accompagnement parental : comment accompagner son enfant, comment le rassurer, comment nommer les émotions de l’enfant : « je sens que tu es fâché », « tu sembles très en colère, je comprends. Voilà ce que j’ai compris… est-ce vraiment ça ?» – il est important d’utiliser le « je » plutôt que le tu… Les dires du parent sont des hypothèses.
- Un travail en collaboration avec les enseignants
Autres formes de thérapie pour apprendre à gérer ses émotions :
- Psychothérapie (travail sur les émotions, élaboration, relaxation…)
- Sophrologie
- Art-thérapie
- Zoothérapie
- Méditation
Evidemment toutes les indications ne conviennent pas à tous les enfants. Peut-être que seulement l’une d’entre elles conviendra au mieux à la personnalité de l’enfant. Une relation de confiance entre le thérapeute et la famille est quant à elle primordiale.
Quoi qu’il en soit, la singularité de chaque enfant m’oblige à exposer qu’il n’y pas de solution standard que l’on pourrait appliquer uniformément.
Petit reportage, Vincent, 9 ans, diagnostiqué précoce: https://www.youtube.com/watch?v=5f5Zg9gFCLs
Une fois que l’enfant est reconnu comme précoce il est essentiel de pouvoir établir un dialogue constructif avec le corps enseignant. Toutefois, les résultats du bilan ainsi que les chiffres qui y figurent n’ont pas à être renseignés. Effectivement, la psychologue Arielle Adda et d’autres spécialistes du surdouement, déconseillent de laisser une copie du bilan chiffré de l’enfant. L’enfant doit avoir le droit d’être reconnu dans sa globalité. Il faut laisser du temps à l’enfant, tout comme à l’enseignant, de se rencontrer et se découvrir.
« – Apprivoise-moi !
– Que faut-il faire ? dit le petit prince.
– Il faut être très patient, répondit le renard. Tu t’assoiras d’abord un peu loin de moi, comme ça, dans l’herbe. Je te regarderai du coin de l’œil et tu ne diras rien. Le langage est source de malentendus. »
Le Petit Prince, Antoine de Saint Exupéry
Marie Fournier-Bidoz
Psychologue clinicienne – psychothérapeute
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